Peut-on parler de « totalitarisme » quand il s’agit de nommer le pouvoir des multinationales ? Alors que la pratique politique voudrait que les sujets d’une collectivité obéissent aux lois, on assiste à un renversement pervers : ce sont les multinationales qui soumettent la délibération des assemblées politiques à d’autres «lois», supérieures, qu’elles s’assurent de rendre efficaces comme par exemple, la «loi» du marché. En s’appuyant sur le cas d’école que constitue l’entreprise Total, le philosophe insistera sur le fait que les sociétés privées se réclament en permanence de la loi pour fonder sur elle leur autorité et la jouissance même de leur domination sociale. Mais que signifie au fond « c’est légal » quand les actes ainsi autorisés par des législations complaisantes – le travail forcé des enfants au Myanmar, la pollution meurtrière du delta du Niger, etc. – choquent la conscience commune ?
Alain Deneault est docteur en philosophie de l’Université Paris-VIII et directeur de programme au Collège international de philosophie à Paris. Il est notamment l’auteur de Noir Canada (Écosociété, 2008), Offshore (La Fabrique/Écosociété, 2010), Paradis sous terre (Rue de l’échiquier/ Écosociété, 2012) et La Médiocratie (Lux, 2015). Il a récemment publié De quoi Total est-elle la somme ? (Rue de l’échiquier/Écosociété, 2017).canadienne» (Ecosociété, 2014).